Pourquoi n'avons-nous pas encore atteint la paix au monde?
Qu'est-ce que cela nécessiterait?
A quoi devrions-nous y attendre?

2010/05/22

L'utilité de la guerre : L'art de la guerre dans le monde moderne

Dans The Utility of War: the Art of War in the Modern World, Alfred A. Knopf, New York, 2007 (L'utilité de la guerre : L'art de la guerre dans le monde moderne), le Général Rupert Smith compare les guerres du passé, ce qu'il appelle la guerre industrielle, avec ceux au présent, qu'il appelle la guerre parmi le peuple.

Pendant la guerre industrielle, des états-nations bien définies se sont roulés en tant que joueurs de poker à haut paris, misant l’entièreté de leur main d'oeuvre et ressources industrielles lors d’une confrontation d'apogée qui finit (tout à fait commodément) dans la défaite totale pour un côté et la victoire totale pour l'autre. Il dit que ce genre de guerre historique a pris fin avec l'arrivée des armes de destruction massive, bien que les nations développées (à vrai dire, tous les états-nations de la terre en armes) se forment, s’organisent et s’équipent pour le comprendre et le combattre, et rien que lui.

Il soutient que les nations modernes doivent apprendre à combattre une nouvelle forme de guerre, dans laquelle des minorités aux moyens et fins spécifiques qui diffèrent de ceux des nations développées, vivent parmi le peuple, et dans laquelle les deux côtés combattent « pour saisir la volonté du peuple. » La devise de ce nouveau genre de guerre est la balle visée tant que l'ordre de la loi doit être rétabli, puis de l'information d’évidence menant à la poursuite et la sentence afin de rétablir, une fois pour toutes, la justice.

À la différence de la guerre industrielle, le peuple n’est pas l'ennemi, quoique l'ennemi vive dans le peuple ; le but présumé est le rétablissement de la justice au lieu de la défaite d'un peuple entier et de son armée ; et la devise commune est de l'information au lieu de la puissance de feu. Les résultats que la guerre parmi le peuple peut réaliser sont l’amélioration, la retenue, la dissuasion-ou-coercition, et la destruction, dans des degrés croissants de force appliquée et ceux en descente de probabilité de succès ; aussi son délai temporel est indéfini sinon sans limite, au lieu d'aussitôt que possible. En conclusion, les militaires ne sont qu’un parmi de nombreux moyens d'atteindre le but stratégique souhaité, et pas nécessairement le primordial comparé aux acteurs politiques, diplomatiques, juridiques et économiques (appartenant aux siens, à ses alliés et au peuple). Ce livre contient trop d'autres bonnes idées pour les entretenir ici ; une lecture recommandée.

En 1984, le Secrétaire (Ministre) de la Défense, Caspar Weinberger, décrit six conditions (selon la doctrine Weinberger) que les États-Unis devaient acquitter pour éviter d’autres bourbiers tels que le Vietnam :

1. Il devrait être d'un intérêt national essentiel aux Etats-Unis et de ses alliés.
2. Cette intervention doit se réaliser de tout coeur avec l’intention claire de vaincre.
3. Il doit y avoir des objectifs politiques et militaires bien définis.
4. Le rapport entre les objectifs et les forces doit être réévalué continuellement et au besoin ajusté.
5. Il doit y avoir une assurance raisonnable que le peuple et le Congrès américains soutiendront cette intervention.
6. L'engagement des forces U.S. devrait être le dernier recours.

Le Général Colin Powell, le président des chefs d'état-major U.S. pendant la première Guerre de Golfe (1991), a ajouté la condition(s) numéro sept.

7. Si les États-Unis interviennent, l'opération devrait être courte, occasionner peu de pertes aux forces U.S., et la force utilisée doit être décisive et écrasante.

Le Général Smith démontre comment ces conditions sont incapables de faire face à la guerre du peuple au lieu de celle industrielle, la raison principale étant que la plupart d'entre elles ne peuvent pas être répliquées avec fiabilité avant qu'une nouvelle opération ne soit entreprise. Plus loin dans son livre (page 392), il énumère un certain nombre de questions aux lesquelles les chefs raisonnables des nations développées doivent répondre avant de s'engager dans une nouvelle aventure militaire.

« Contre qui sommes-nous opposés ? Quel est le résultat qu'ils désirent ? Quel avenir menacent-ils ? Comment cela différerait-il de nos résultats désirés ?
« Cherchons-nous l'ordre ou la justice ? Selon le degré d’entre eux, où est notre aboutissement ? Si nous cherchons la justice, pour qui ?
« Avec qui allons-nous traiter, leurs chefs actuels ou souhaitons-nous d'autres au pouvoir ? Si oui, qui sont-ils ? Est-ce que nous souhaitons entièrement transformer la gérance actuelle ? Sinon, qui reste ?
« Nous nous servons des lois de qui ; des leurs ou des nôtres ? Si les nôtres ; souhaitons-nous que leur loi change ?
« Qui administre cet état ; eux ou nous ?
« Savons-nous les résultats que nous désirons suffisamment en détail pour nous permettre de fixer les objectifs à réaliser ? Sinon, le mieux que nous pourrions réaliser est une situation susceptible d’être conductrice au résultat que nous approuverions. Pouvons-nous définir cette « condition » de sorte que nous puissions fixer des objectifs à réaliser ? Sinon ; le mieux que nous puissions réaliser est d'améliorer et de contenir, tandis que nous trouverons les informations afin de répondre aux questions énumérés ci-dessus.
« À quel niveau (stratégique, théâtral ou tactique) pourrions-nous atteindre en théorie des objectifs directement par la force d’armes ? Devons-nous le faire ? Pouvons-nous le faire ? Le ferons-nous ? Quand est-ce que nous le ferons ?
« Sinon, de quoi sommes-nous préparés à menacer et promettre pour atteindre les objectifs que nous avons définis ? Qu’est-ce que l'adversaire évalue que nous pourrions menacer ? Que veut-il le plus ? (Nous rappelant toujours que les menaces sont coûteuses quand elles échouent et les pots au vin le sont quand ils réussissent.) Quand le ferons-nous ?
« Comment démontrons-nous que la menace est croyable ; que nous la réaliserons, que nous réussirons même si nous devons escalader pour garantir cette réussite ? Est-ce que toutes les autres lignes de conduite nous étant ouvertes sont perçues comme moins attrayantes que la réalisation de notre menace ?
« Comment démontrer que les menaces de l'adversaire sont insuffisantes et que nous rejetons leur résultat alternatif ?
« Comment assurer que nos promesses sont croyables aux yeux de l'adversaire et du peuple ?
« Comment assurer que l'adversaire et le peuple peuvent être fiables ? »

Par-dessus et au delà des questions que pose le Général Smith, celles les plus honnêtes qu'une état-nation devrait se demander :

L'anarchie militaire de la terre en armes, confirmée actuellement par les états-nations et les organisations terroristes du monde développé autant que celui sous-développé, est-elle justifiable pour des raisons morales, tactiques ou stratégiques ? La terre en armes n'offrirait-elle pas une entente moins paradoxale pour défendre les idéaux les plus valides implicites dans les questions énumérées ci-dessus ? Entre-temps, ne sommes-nous pas moralement interchangeables avec ces terroristes, seulement des truands mieux financés et organisés ; donc incapables de les vaincre à long terme, puisque démuni du vouloir d’adopter les obligatoires moyens moraux, de propagande et organisationnels (du monde en paix) pour l’entreprendre pour de bon ?